La dernière génération de vélos tout suspendus de Norco
Les Canadiens de la marque Norco ont lancé leur dernière gamme de vélos tout-terrain, où chaque modèle est équipé d’une suspension avec un point de pivot haut. Après l’Aurum et le Shore, c’est le Range qui fait son entrée. Ce dernier est un vélo enduro robuste, semblable au Santa Cruz Nomad, avec un débattement de 170 mm à l’avant et à l’arrière.
Même si l’Aurum de DH et le nouveau Range partagent une suspension à point de pivot haut, les technologies utilisées diffèrent sur les deux vélos. L’Aurum utilise un bras oscillant à point de pivot unique, tandis que le Range adopte un système de suspension de type Horstlink à point de pivot haut. Cela entraîne de nombreux changements, notamment le fait que la trajectoire de la roue arrière n’est pas simplement une portion de cercle, mais est influencée par des points de pivot virtuels.
Dans cette configuration, les points de pivot sont à l’intersection des lignes formées par les axes de la biellette inférieure et ceux des haubans, alors que sur un système Horstlink traditionnel, ils sont à l’intersection des lignes formées par la biellette supérieure et les bases. Le principe reste le même, avec une biellette en position inférieure. L’objectif des suspensions à point de pivot haut est d’offrir une trajectoire initiale de la roue arrière qui est le plus tangent à l’impact possible, une trajectoire qui part plus vers l’arrière. Cela permet d’augmenter la stabilité du vélo lorsqu’il est en mouvement. Cependant, le principal inconvénient est qu’il y a une grande tension sur la chaîne, ce qui peut provoquer un fort recul lors du pédalage, ou bloquer la suspension lors de la descente. Pour résoudre ce problème, la chaîne est déplacée via une poulie pour passer au plus près de l’axe de la liaison principale, ici, entre le cadre et les haubans. Sur le Range, le point de pivot est initialement très haut, légèrement en avant de cette poulie de renvoi, pour réduire les interactions entre la chaîne et le pédalage. Ensuite, au fur et à mesure que le vélo pénètre dans le débattement, le point de pivot descend et s’éloigne vers l’avant du vélo afin d’obtenir une trajectoire plus verticale et donc de limiter l’augmentation de la distance entre l’axe du pédalier et l’axe de la roue arrière. Tous les aspects cinématiques du triangle arrière ont été soigneusement étudiés sur ce Range.
« Le Norco canadien, un champion des sauts et du bûcheronnage intense ! »
L’articulation de la biellette inférieure est coaxiale à l’axe du pédalier et s’insère dans le cadre. Par conséquent, le boîtier de pédalier est logé dans cette biellette. Elle dépasse légèrement sous le cadre et est protégée des chocs éventuels par un petit sabot. Elle comprime l’amortisseur qui est placé très bas dans le cadre et presque à l’horizontale sous le tube de selle, afin de minimiser le centre de gravité. Les pattes de la roue arrière sont en aluminium et vissées sur les bases, ce qui permet à Norco d’ajuster leur longueur pour chaque taille de vélo, sans avoir besoin de moules différents pour l’ensemble bases/haubans. Attention, Norco n’a pas prévu de changer ces pattes comme un réglage possible : une taille de cadre correspond à une longueur de patte. Le triangle avant est très compact avec un énorme tube diagonal et un tube supérieur plus plat et anguleux, ce qui laisse présager une grande rigidité latérale. Chez Norco, chaque taille de châssis a une géométrie spécifique. Ils ont été les premiers à allonger les bases en fonction de la taille du vélo, mais sur ce Range, même les angles de direction et de selle changent ! L’angle de chasse s’ouvre tandis que l’angle de selle se redresse au fur et à mesure que l’on monte en taille. Enfin, on remarque de bonnes protections des bases et des haubans contre les agressions de la chaîne. Ce vélo respire la technicité, c’est vraiment une belle pièce mécanique.
Équipements
Il y a trois modèles de Range dans la gamme Norco, tous en carbone, avec des prix allant de 6000 à 9900€. Le C2 est le modèle intermédiaire, à 7500€. Le kit cadre coûte déjà 4100€. En termes de suspension, il dispose d’une fourche Rock Shox Zeb Ultimate RC2 réglable en compression haute et basse vitesse ainsi qu’en détente. Il dispose également d’un levier pour durcir la fourche lors du pédalage. Pour l’arrière, Norco a choisi un Fox DHX2 Factory avec des réglages de compression et de détente hautes et basses vitesses. La transmission GX est fournie par Sram, avec un petit anti-déraillement MRP efficace et des freins Code R quatre pistons qui pincent des disques de 200 mm. D’origine, il est livré avec des jantes E-Thirteen LG1 montées sur de bons moyeux DT Swiss 350, mais notre vélo de test était équipé de roues complètes FSA Grid. Pour les pneus, Norco a choisi un excellent Combo Maxxis avec un Assegai en 2.5 » à l’avant et un Dissector en 2.4 » à l’arrière, tous deux en carcasse renforcée DD et en gomme super tendre MaxxGrip. Parfait. Un bon montage même si ce Range est plutôt lourd pour un vélo d’enduro.
Pour être honnête, quand on voit cette bête sur le parking, on n’est pas vraiment pressé de gravir les 600 m de dénivelé positif sur piste qui mènent au début de la descente de ce premier run. Le Range ressemble plus à un vélo de DH endurisé qu’à un All Mountain bodybuildé… Ce qui soulève des questions sur ses capacités de grimpeur. Une fois en selle, la position est très confortable. L’angle de selle n’est pas parmi les plus droits du marché, mais il est suffisamment droit pour offrir une position de montée efficace. Et finalement, dès que l’on emprunte la piste de montée, on est rassuré, le Norco n’est pas du tout désagréable au pédalage. Il y a bien une légère oscillation de la suspension, qui cesse dès que l’on utilise la position Firm de l’amortisseur. En termes de vitesse d’ascension, il ne rivalise pas avec les meilleurs enduros mais il est loin d’être ridicule, on s’attendait à beaucoup moins compte tenu de son ADN. Pour donner un ordre d’idée, on mettait 10 minutes de plus (pour une heure d’ascension) qu’avec les meilleurs pour rejoindre le sommet, mais à peine 5 minutes de plus que la moyenne des chronos. Une performance loin d’être catastrophique, d’autant plus que le vélo n’est pas du tout épuisant à conduire. De toute façon, il n’a pas été conçu pour faire de la balade, mais plutôt pour claquer des temps en descente sans vous épuiser physiquement en liaison. Et sur ce dernier point, c’est mission accomplie. En montée technique, la motricité est très bonne et les capacités en franchissement intéressantes, mais dans les épingles bien fermées, le Range est encombrant et manque un peu de maniabilité. D’autre part, il manque de nervosité pour sortir des passages les plus difficiles et sa performance s’effondre un peu face à la concurrence lorsque la pente s’accentue. On le préfère nettement dans les montées progressives sur piste, qui ne demandent pas de fournir de grosses accélérations. La première descente choisie est rapide et bien cassante, elle passe à travers des dalles et des rochers bien ancrés dans le sol, mais pas toujours bien agencés… Quelques rares épingles fermées jalonnent le parcours, mais on trouve surtout de beaux virages ronds, avec un sol tantôt extra, tantôt fuyant. Sans surprise, le Range est un véritable un avion de chasse dans les longs bouts droits cassants où l’on peut lâcher complètement les freins. Le vélo est sur des rails, il se montre hyper rigoureux et vraiment très sécurisant. Il file droit sans perdre un iota de vitesse, c’est diablement efficace !
« On peut rater ses sauts, poser aux mauvais endroits, aucun souci. Rentrer comme une brute dans les virages, aucun souci. Mais ne comptez pas sur le Range pour vous faciliter la tâche sur des terrains très difficiles. »
L’arrière du vélo absorbe les chocs sans broncher, la suspension se durcit assez rapidement et travaille assez haut : en conséquence, le Norco ne s’affaisse pas trop sur les impacts et ne se tanque pas dans le relief. Le sentiment de sécurité s’estompe un peu au freinage, où le vélo est assez physique à tenir lorsque le terrain est chaotique. Le passage du point de pivot haut au point de pivot virtuel haut est censé libérer la suspension au freinage. En effet, cela a pour effet de baisser le niveau d’antirise et s’il y a du mieux sur le terrain, cela reste exigeant physiquement. Le Range bouge un peu de l’arrière quand le terrain est plein de pierres et de racines : il a des réactions vives qui perturbent un peu le pilote, il faut bien le tenir et cela devient éprouvant pour les bras et les jambes. Il faut dire que le châssis ne fait pas dans la dentelle, il est vraiment très rigide. On le ressent aussi dans les enfilades de virages où le Norco demande à être rudoyé, il faut s’engager constamment. À basse vitesse, il n’est pas très amusant dans les zones sinueuses, son truc à lui c’est vraiment la vitesse.
Un tempérament qu’il a confirmé par la suite, notamment sur des trails enduro techniques comme aux Seiglières. Rien à redire sur l’efficacité pure : tant que l’on est en mode attaque le couteau entre les dents le Range est très performant, il permet de rouler très fort et très vite. Il est notamment excellent sur des parcours avec de grosses compressions qui ont tendance à casser la vitesse car il ne s’y tasse pas et conserve une vitesse supérieure à la moyenne. C’est flagrant comme ce vélo reste dynamique dans ces phases. Même constat dans les gros virages relevés, si on rentre dans l’appui avec une agressivité digne de le faire reculer de deux mètres, on en ressort comme une balle. Le vélo ne se comprime pas outre mesure et ressort aussi vite qu’il est entré. Grisant. En revanche, quand il faut traverser un pierrier mal agencé ça se gâte. Le cadre ne se déforme pas d’un pouce et on est malmené, même si les suspensions font très bien le job. Il faut vraiment s’employer physiquement pour garder le cap. En fait, il y a deux façons pour un vélo d’être inconfortable, mais une seule impacte les pilotes moins chevronnés. Soit les suspensions talonnent trop fréquemment et le rider se fait autant malmener que le vélo souffre, soit le vélo est hyper résistant et dit sans cesse « même pas mal » dans les pires situations, en faisant souffrir le pilote. Le Norco est dans la deuxième catégorie. On peut rater ses sauts, atterrir aux mauvais endroits, aucun problème. Rentrer comme une brute dans les virages, aucun problème. Mais ne comptez pas sur le Range pour vous faciliter la tâche sur des terrains très difficiles.
Conclusion
Le Norco Range est un vélo fait pour bûcheronner et rouler à fond sur des pistes qui envoient du gros. Il est plutôt destiné à des pilotes techniques et avec un bon physique, car il n’est pas très accessible techniquement, principalement en raison d’un châssis bien robuste. Il n’est pas très amusant sur des trails lents et sinueux mais super plaisant sur des parcours travaillés avec de gros appuis et des sauts déjà bien sérieux. Un régal en réception où l’on a l’impression de ne jamais venir à bout du débattement.
Pour qui
Pour des riders solides techniquement
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